Biomimétisme : «Chaque fois que l’humanité rencontre un problème, la nature a certainement déjà trouvé une solution»

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INTERVIEW Idriss Aberkane, enseignant chercheur et consultant international, explique comment le biomimétisme pourrait sortir le monde de la crise écologique et économique…

 

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Le byssus des moules est la colle la plus puissante au monde. – Paul Kay / SplashdownDirect / Re

Propos recueillis par Audrey Chauvet

Publié le

Copier la nature : une idée simple qui pourrait pourtant être révolutionnaire. Le biomimétisme, un terme en vogue depuis quelques années, consiste à s’inspirer des animaux ou des plantes pour créer des produits plus écologiques, plus efficaces et plus riches en intelligence qu’en matières premières. Idriss Aberkane, enseignant chercheur et consultant international, croit en cette « révolution » dont il présentera les principes le 10 février lors d’une conférence à l’Institut océanographique.

En quoi consiste le biomimétisme ?

C’est une technique ancienne qui revient aujourd’hui avec des arguments techniques mais aussi managériaux, économiques et politiques. Le biomimétisme a été utilisé depuis le début de l’humanité : les premiers hommes se sont inspirés des termitières pour construire leurs maisons, le béton armé a été inventé par un jardinier qui a copié les nervures des feuilles pour permettre une meilleure résistance des pots qu’il utilisait pour rempoter ses orangers. Même la tour Eiffel est une œuvre de biomimétisme : elle doit sa légèreté à ses piliers qui ont été inspirés par la structure des tibias humains.

Pourquoi est-on en train de redécouvrir le biomimétisme ?

Parce que depuis 250 ans, on répand dans le monde un mensonge qui consiste à dire que nature et emploi sont inconciliables : soit on veut protéger l’environnement, soit on veut de la croissance économique. On nous fait croire qu’il faut choisir, par exemple, entre avoir un réfrigérateur et protéger la forêt amazonienne. Or, c’est faux. La nature produit mieux que nous et crée des emplois. Ce n’est pas à la nature qu’il faut demander d’être productive comme nos usines mais à nos usines d’être aussi efficaces que la nature.

En quoi la nature est-elle meilleure que les procédés industriels ?

Déjà parce que le produit fini de la nature est meilleur : la façon dont la nature produit du silicium par exemple, est extraordinaire. Une diatomée [microalgue qui produit de la silice] vue au microscope, c’est très beau. Et en plus, la nature a des procédés imbattables : si l’on reprend l’exemple de la silice, il suffit d’un verre d’eau à température ambiante pour la produire… Autre exemple de la supériorité des procédés naturels : un pigeon peut atterrir sur une surface qui ne représente qu’un sixième de sa longueur, alors qu’aucun avion ne peut le faire.

Quel rôle peuvent jouer les océans dans le développement du biomimétisme ?

Les océans sont le berceau de la vie : la nature fait de la R & D [recherche et développement] depuis 4 milliards d’années et les océans en sont le plus grand laboratoire. Par exemple, le byssus des moules est la meilleure colle connue au monde. L’océan regorge d’antibiotiques, d’organismes bioluminescents… Il faut bien se dire qu’à chaque fois que l’humanité rencontre un problème, la nature l’a certainement déjà rencontré par le passé et a trouvé une solution. Autant s’en inspirer.

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